La transition énergétique se traduit par l’abandon d’énergies fossiles au profit d’énergies renouvelables. Elle marque la volonté des états signataires des accords sur le climat de promouvoir un développement économique respectueux de l’environnement.
La Loi française précise d’ailleurs « la nécessité d’un développement économique respectueux de l’environnement, sobre et efficace en énergie et en consommation de ressources et de carbone, socialement inclusif, soutenant le potentiel d’innovation et garant de la compétitivité des entreprises ».
Aux États-Unis, la transition énergétique consiste avant tout à réduire la dépendance vis-à-vis des importations d’hydrocarbures et des produits conventionnels, via des technologies de forage de plus en plus sophistiquées.
En Europe, les options sont beaucoup plus volontaristes et portent sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la promotion des énergies renouvelables et l’incitation à l’efficacité énergétique.
Néanmoins, les stratégies énérgétiques nationales demeurent contradictoires. « Au nom de la transition énergétique, l’Allemagne quitte le nucléaire, le Royaume-Uni cherche à y revenir, la Pologne à y entrer et la France organise un grand débat citoyen », souligne l’économiste Christian de Perthuis.
Concernant la transition énergétique, les travaux de recherche sont unanimes sur l’importance de l’innovation dans ce secteur d’activité. Celle-ci permet d’agir aussi bien sur les dispositifs encourageant la sobriété énergétique que sur ceux favorisant la création d’énergies renouvelables. Bien que les innovations inhérentes aux énergies renouvelables soient beaucoup plus massives et intenses en innovation que celles du secteur de la sobriété énergétique (notamment dans le BTP).
La transition énergétique suscite un certain nombre de questionnements quant à son impact sur l’investissement et l’emploi.
Ainsi, précisons que l’effet innovation peut aisément se traduire par un impact net sur l’investissement. C’est particulièrement le cas dans le secteur des énergies renouvelables, le secteur de la sobriété énergétique en bénéficiant moins.
En effet, les énergies renouvelables supposent la création de filières nouvelles, complètement intégrées, qui disposent de financements public-privés (encouragés par des incitations fiscales très importantes) qui permettent de structurer l’innovation.
Concernant l’impact sur l’emploi de la transition énergétique, le cabinet PricewaterhouseCoopers (PWC) a réalisé une étude pour le compte de la multinationale de l’énergie Areva. Cette étude portait sur l’impact de la transition énergétique sur l’emploi industriel, notamment de la filière nucléaire.
Selon cette étude, l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique se traduirait par un impact négatif sur l’emploi dans la filière nucléaire. Cet impact serait répercuté nationalement, car la filière tient une place importante dans l’économie et les territoires français. D’après l’étude, la filière nucléaire générerait 410 000 emplois directs et indirects.
En comparaison, le renouvelable offre-t-il de nombreux emplois ? L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) précisait que plus de 300 000 équivalents temps plein avaient été créés en 2010, dans le secteur des énergies renouvelables et dans celui de l’efficacité énergétique (notamment dans le BTP et le transport).
L’étude d’impact de la transition énergétique en termes d’emplois nécessite donc, par exemple, de prendre en considération l’effet de substitution de l’emploi nucléaire par les emplois induits par la transition énergétique. Ce schéma classique est communément admis dans la théorie économique comme un phénomène de destruction créatrice.
Le rapport Stern sur l’économie du changement climatique met en évidence l’idée forte selon laquelle l’inaction en matière de transition énergétique serait désastreuse et plus coûteuse que l’action elle-même.
Nicolas Stern (ancien vice-président de la Banque mondiale) valorise le coût du changement climatique à une perte régulière et durable de 5 à 20 % du PIB mondial. À l’inverse, le rapport valorise le coût de la décarbonisation des économies à environ 1 % du PIB mondial chaque année.
À juste titre, le secteur de la finance s’intéresse depuis plusieurs années aux enjeux du dérèglement climatique et de la transition énergétique. Ces dernières années, les investisseurs institutionnels (comme La Caisse des Dépôts, l’Établissement de retraite additionnelle de la fonction publique (Erafp), le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) et Humanis) se sont engagés à décarboner une partie de leurs actifs. Certains fonds d’investissements ont signé le « Montréal Carbon Pledge » et publient désormais leur empreinte carbone.
Ce choix est autant une question d’inquiétude que d’intérêt. En effet, si les investisseurs institutionnels gèrent plus de 100 trillions de dollars d’épargne dans le monde, le contexte macroéconomique actuel ne leur permet pas de répondre aux exigences de rentabilité de leurs épargnants (opportunités de placement limitées et de taux de rendement très faibles).
De ce fait, la profession financière en appelle à des politiques de relance par l’investissement. Celles-ci permettraient aux investisseurs de privilégier des actifs sûrs et rémunérateurs. Les projets inhérents à la transition énergétique entrent dans cette catégorie d’investissements.
Il serait alors possible d’aligner les intérêts financiers des investisseurs avec l’intérêt général, en mettant les milliards de dollars gérés par les investisseurs institutionnels au service de la transition énergétique.
L’investissement vert répond par ailleurs à un besoin de rentabilité et constitue également, pour les fonds d’investissement s’y engageant, un enjeu de communication et de valorisation financière.
Et ce, d’autant plus que la loi de transition énergétique oblige les investisseurs institutionnels à communiquer « la contribution de leurs investissements aux émissions de CO2 et à leur réduction ».
Heger Gabteni, Professeur associé en Finance, PSB Paris School of Business – UGEI et Adil Bami, Professeur associé en Economie, Groupe ISCAE
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.